Figurez-vous que je suis content. Content, bien sûr, parce que l'incertitude concernant l'avenir de l'Opéra de Paris est désormais levée. Content parce que Nicolas Joel, à cette occasion, a trouvé le moyen de se ridiculiser une fois de plus. Mais aussi, surtout, content parce que son vainqueur est Stéphane Lissner.
(je devais mettre en ligne un article de plus sur Kurtag, du côté des disques et des livres : ce sera pour très bientôt, l'actualité reprend ses droits !)
Commençons par l'épisode précédent du feuilleton : Nicolas Joel utilise le Journal du Dimanche, cette feuille de chou que personne ne lit d'habitude, pour annoncer qu'il a vertueusement renoncé à être candidat pour sa succession, scandalisé qu'il est par l'annonce de coupures budgétaires pourtant limitées, et inférieures à l'excédent que sa politique pusillanime a "réussi" à dégager pour l'année 2011 (on lui prend donc de l'argent qu'il n'avait pas réussi à utiliser, voir ici). Sauf que, patatras : le lendemain (aujourd'hui, donc), le cabinet de la ministre ne se prive pas de faire savoir par Le Monde que Nicolas Joel a tenu à maintenir sa candidature jusqu'au bout alors qu'il n'avait aucune chance et qu'il était au courant depuis longtemps de ces coupures budgétaires.
Voilà pour le ridicule. Inutile de développer, je pense, le fait que personne ne pleurera vraiment Nicolas Joel : il suffira de rappeler les triomphes artistiques, publics et critiques, de la saison précédente, Manon mis en scène par Coline Serreau en pleine osmose avec Natalie Dessay et Faust magnifié par Jean-Louis Martinoty et marqué par l'entente cordiale entre Roberto Alagna et Alain Lombard pour mettre en évidence le fait qu'un même amour pour Nicolas Joel unit désormais les modernistes et les tradis.
Il n'est pas inutile, en revanche, d'insister un peu plus sur le nouveau que sur l'ancien, cf. les commentaires pas vraiment tendres à l'égard de Lissner dans mon message précédent sur le sujet. Lissner, c'est entendu, n'est pas un inventeur. Ce n'est pas Gerard Mortier, ce n'est pas Serge Dorny, ce n'est pas Peter de Caluwe, ce n'est pas (zut, je ne peux pas citer que des Belges ! euh...) ce n'est pas Dietmar Schwarz (le brillantissime programmateur de l'opéra à Bâle ces dernières années, désormais au Deutsche Oper de Berlin). Mais il a le sens de l'événement, dans le meilleur sens du terme : pas celui qui accompagne le champagne et les petits fours et donne l'occasion de sortir sa belle robe (façon Netrebko à Salzbourg), mais celui qui frappe parce qu'il crée la curiosité et qu'on se dit, en sortant, qu'on n'imaginait pas que ça pourrait être aussi bien.
Je ne sais pas quels sont ses goûts personnels, et je m'en moque ; peut-être, comme certains cadres supérieurs de l'Opéra présents sur Twitter, aime-t-il avant tout la mode, Johnny Halliday et Madonna. Peut-être est-ce un pur opportuniste, qui ne joue le jeu de la modernité que par intérêt bien compris. Quelle importance ? Du moins, fût-ce par pur opportuniste, il a compris ce que n'a jamais compris Nicolas Joel : que tout est dans l'art du dosage. Oui, il est très possible que sous Lissner l'inusablement mauvaise Tosca mise en scène il y a 18 ans par feu Werner Schroeter refasse un tour de piste, dans une distribution pas forcément meilleure que celle de cette année, parce que ça ne coûte rien et que ça rapporte gros ; mais l'essentiel, c'est le reste, ce que je ne peux pas prévoir, ce qui suscite un frémissement dès qu'on le voit apparaître dans une nouvelle saison, ou au contraire ce qu'on va voir par acquit de conscience et dont on sort chaviré.
Il n'y a pas de quoi pleurer de bonheur, dans cette nomination, nous sommes tous d'accord. Mais j'ai du moins l'espoir d'une bonne petite série de belles soirées qui font aimer l'opéra dans toute sa diversité.
lundi 8 octobre 2012
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