samedi 23 juillet 2011

Quand Mitterrand plaidoie, la caravane (tré)passe

Frédéric Mitterrand est le premier ministre de la Culture depuis longtemps à avoir eu un quelconque rapport à la culture avant son accession au trône (on avait bien choisi Donnedieu de Vabres parce que la particule fait distingué) ; ce n'est pas rien, mais ce n'est pas non plus beaucoup. Le texte mal écrit qu'il a fait publier dans Le Monde pour répondre aux propos de Martine Aubry sur la culture est assez consternant, il faut bien le dire, à la fois du point de vue littéraire et quant à son contenu - mais pouvait-il faire mieux ?
On y apprend que le ministère de la Culture a eu plein de sous grâce au petit Nicolas, mais que pour autant il ne faut pas trop s'arrêter aux questions d'argent. On y apprend qu'il mène une politique culturelle, ce qui est tout de même une forte surprise.
Mais ce que j'aime toujours avec de tels beaux exercices de langue de bois, c'est que l'essentiel, malgré tout, y transparaît toujours. Sous la condamnation d'un étatisme (nécessairement) dépassé, c'est la dissolution des DRAC (directions régionales à l'action culturelle, financées par l'État) qui apparaît, DRAC dont l'utilité est variable selon les domaines, mais où l'indispensable n'est pas moins touché que le superflu dans les politiques d'économies en cours - car autant frapper chacun également plutôt que de réfléchir à ce qui est vraiment utile. En échange, il est facile d'en appeler au "renforcement du partenariat entre l'Etat et les collectivités locales", qui est un autre nom de cette bien connue tactique de l'État depuis 2002 consistant à balancer sur elles (tout en leur reprochant de trop dépenser) les dépenses que l'État ne veut plus assumer. L'État se veut alors "incitateur" : M. le Ministre n'ignore pas que les conseilleurs ne sont pas les payeurs.
Comme Mime au 2e acte de Siegfried, M. le Ministre dit les choses désagréables en croyant très bien les dissimuler. Le désengagement de l'État est présent à chaque ligne de ce texte décidément mal fichu. On n'y parle que d'industries culturelles (les vendeurs de blockbusters et de musique pour décérébrés), que d'aller mendier de l'argent aux mécènes et aux opérateurs de téléphone : comme si cela ne suffisait pas que l'Opéra de Paris ait pour mécène principal une entreprise qui fait son beurre de nos papiers gras, il faudrait que tout le monde de la culture ne soit qu'un appendice au secteur - tellement plus essentiel pour la nation - de la téléphonie.

À une époque où Christophe Tardieu, DG de l'Opéra de Paris, ne se cache pas pour expliquer que les pauvres n'ont qu'à aller voir les retransmissions au cinéma s'ils trouvent les places d'opéra trop chères, alors que la Cour des Comptes vient de remettre un rapport qui assassinait les musées nationaux pour leur politique socialement élitaire et indigne des missions humanistes qui sont les leurs, je crois qu'on est en droit d'attendre un peu plus d'un ministre de la Culture, même sarkozyste.

1 commentaire:

  1. Pour bien comprendre l'opposition entre le projet Sarkosyste de Frédéric Mitterand et la vision sociale de Martine Aubry, il est nécessaire de comparer le vocabulaire qui les engage.
    Le ministre utilise des termes qui concerne les systèmes de télécommunication (numérique, diffusion, accès, communication), quand la première secrétaire du parti socialiste revient à un langage d'apprentissage, d'éducation, de rencontres et de vie.

    Frédéric Mitterrand est le ministre de l'industrie culturelle, rien de plus.

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