Tout à la question de la succession de Nicolas Joel, j’ai oublié dans le message précédent d’en profiter pour parler d’une autre succession pendante à l’Opéra de Paris, celle de Brigitte Lefèvre, qui prendra une retraite certainement méritée, mais surtout très attendue, en 2014.
Je pourrais faire, sur 10 pages, un bilan complet de l’état de la troupe, c’est-à-dire non seulement de ses danseurs, mais aussi de son répertoire, de son image, de son public, de sa place dans le monde de la danse d’aujourd’hui. Je n’en ai ni le courage, ni le temps, ni vraiment les compétences ; j’observerai seulement que la réception critique de la récente tournée aux États-Unis avait de quoi faire réfléchir : le plus grave n’est pas que beaucoup de critiques aient eu des réticences sur les programmes choisis, en particulier sur Petit ou Lifar, et bizarrement plus encore sur Orphée et Eurydice de Bausch ; le plus grave n’est pas qu’ils aient eu la dent dure sur beaucoup de distributions, du point de vue tant technique qu’artistique (si tant est que les deux puissent être distingués) : non, le plus grave, c’est que sur ce dernier point ils ont hélas raison. Et, pour beaucoup, nous le savons, et ce n’est pas d’hier.
Incompris du public car massacré par les danseurs : Rain de Keersmaeker, révélateur d'une troupe malade |
Je pourrais faire, sur 10 pages, un bilan complet de l’état de la troupe, c’est-à-dire non seulement de ses danseurs, mais aussi de son répertoire, de son image, de son public, de sa place dans le monde de la danse d’aujourd’hui. Je n’en ai ni le courage, ni le temps, ni vraiment les compétences ; j’observerai seulement que la réception critique de la récente tournée aux États-Unis avait de quoi faire réfléchir : le plus grave n’est pas que beaucoup de critiques aient eu des réticences sur les programmes choisis, en particulier sur Petit ou Lifar, et bizarrement plus encore sur Orphée et Eurydice de Bausch ; le plus grave n’est pas qu’ils aient eu la dent dure sur beaucoup de distributions, du point de vue tant technique qu’artistique (si tant est que les deux puissent être distingués) : non, le plus grave, c’est que sur ce dernier point ils ont hélas raison. Et, pour beaucoup, nous le savons, et ce n’est pas d’hier.
Ce qui manque ? C’est pas grand-chose, mais c’est l’essentiel. C’est un peu d’ambition artistique ; c’est le regard d’un directeur qui sait deviner les talents des uns et des autres et les favoriser, plutôt que d’attendre que le hasard leur donne peut-être un jour l’occasion de se distinguer ; c’est la capacité à donner une cohérence artistique à la compagnie plutôt que de bêler en alternance sur le respect dû aux traditions et sur la nécessité de continuer à créer (bêlements aussi justes l’un que l’autre, mais stériles si on ne fait que les placer côte à côte).
Brigitte Lefèvre est arrivée au pouvoir – par ce qui s’appelle une prise de pouvoir, avec manœuvres tactiques et conspirations – en 1995, suite au fiasco de la direction de Patrick Dupond, en sachant admirablement exploiter la position subalterne qui était la sienne. Sans doute est-ce là sa plus grande réussite, cette capacité à conserver et exercer le pouvoir – quitte à écraser les personnalités et à produire la troupe insipide actuelle, où conformisme et peur de son ombre semblent être des vertus à la mode. Bien sûr, Lefèvre a bénéficié pendant la première partie de son long mandat de la génération miraculeuse produite par les années Noureev, à qui les danseurs d’aujourd’hui n’aiment pas forcément beaucoup être comparés. Mais les faiblesses de la génération actuelle ne peuvent plus guère être masqués.
Sa succession ne ressemblera pas à cette prise du pouvoir. On se doute que les appétits sont aiguisés : tout ce qu’on entend, pourtant, c’est le nom d’étoiles de l’Opéra, retraitées ou sur le point de l’être, et tous des hommes – car, c’est bien connu, hors des Catherine de Médicis, le pouvoir est affaire d’hommes (pour la première fois, en tout cas depuis très longtemps, une création va être confiée cette saison à une danseuse, et non à un danseur, de la troupe - révolution !). Certains ont dit qu'ils n'étaient pas intéressés, aucun n'a vraiment dit qu'il l'était, parce que c'est comme pour un conclave : les candidatures ouvertes, ça ne se fait pas.
Alors, Machin, Truc, Bidule ? Je n'ai pas d'argument pour l'un ou pour l'autre, et non seulement je ne sais pas qui sortira du chapeau, mais en plus je n'ai pas vraiment d'avis. Simplement, je ne souhaite pas que ce soit une étoile encore en activité, ou trop fraîchement retraitée, qui serait tenté de mélanger les genres - on a vu ce que ça a donné à l'époque de Patrick Dupond, on voit ce que ça donne actuellement au Ballet de Berlin, la seule troupe au monde qui ose faire toute une saison sans création ou entrée au répertoire.
La décision, on le sait, n'aura de toute façon pas lieu avant que soit nommé le successeur de Nicolas Joel, qui devra nommer un directeur de la danse à sa convenance, dans un choix qui me paraît en réalité très limité : il faut espérer qu'il saura choisir une personnalité qui saura marquer la nécessaire rupture avec Mme Lefèvre, qu'il s'agira d'écarter fermement de la maison. Mais le mieux, à vrai dire, pour l'avenir, ce serait de faire la même chose qu'à Munich ou Londres : donner enfin son autonomie administrative au ballet, et faire du directeur de la danse l'égal du directeur de l'opéra. La danse le mérite bien, et cela ne pourrait que donner à la troupe le coup de fouet qu'il lui faut.
Alors, Machin, Truc, Bidule ? Je n'ai pas d'argument pour l'un ou pour l'autre, et non seulement je ne sais pas qui sortira du chapeau, mais en plus je n'ai pas vraiment d'avis. Simplement, je ne souhaite pas que ce soit une étoile encore en activité, ou trop fraîchement retraitée, qui serait tenté de mélanger les genres - on a vu ce que ça a donné à l'époque de Patrick Dupond, on voit ce que ça donne actuellement au Ballet de Berlin, la seule troupe au monde qui ose faire toute une saison sans création ou entrée au répertoire.
La décision, on le sait, n'aura de toute façon pas lieu avant que soit nommé le successeur de Nicolas Joel, qui devra nommer un directeur de la danse à sa convenance, dans un choix qui me paraît en réalité très limité : il faut espérer qu'il saura choisir une personnalité qui saura marquer la nécessaire rupture avec Mme Lefèvre, qu'il s'agira d'écarter fermement de la maison. Mais le mieux, à vrai dire, pour l'avenir, ce serait de faire la même chose qu'à Munich ou Londres : donner enfin son autonomie administrative au ballet, et faire du directeur de la danse l'égal du directeur de l'opéra. La danse le mérite bien, et cela ne pourrait que donner à la troupe le coup de fouet qu'il lui faut.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Une petite râlerie ? Une pensée en l'air ? Une déclaration solennelle à faire ? C'est ici !
NB : Les commentaires sont désormais modérés en raison de problèmes de spam. Je m'engage à publier tous les messages qui ne relèvent pas du spam, même à contenu désagréable