lundi 30 septembre 2013

Alceste, la faute à pas de chance

Oui, croyez-le bien, j'en suis désolé. Minkowski et Gluck, ça fait longtemps qu'on sait que c'est une affaire qui marche (entre autres grâce à la fameuse Iphigénie en Tauride qui aura marqué les triomphaux débuts parisiens de Krzysztof Warlikowski). Olivier Py n'est pas vraiment un de mes metteurs en scène favoris, mais après son très stimulant et intense Trouvère de Munich, tous les espoirs étaient permis, et vraiment, pour une fois, si ça n'a pas marché, ce n'est vraiment pas la faute de Nicolas Joel, sinon qu'il aurait peut-être un peu pu faire attention au fait que le sieur Py se retrouvait ainsi engagé à livrer trois productions en trois mois et demi.
Devinette : combien de productions d'opéra à l'Opéra Garnier jouent-elles avec l'apparence de l'Opéra Garnier (Photo Opéra de Paris)


Pas besoin de décrire la production : que vous l'ayez vue ou non, vous savez à quoi elle ressemble, avec ces décors dessinés à la craie de scène en scène, sur un fond imperturbablement noir (comme ledit Trouvère). J'y suis pourtant arrivé avec quelques illusions, en pensant que le spectacle aurait un peu quelque chose de la concentration minimaliste du Dogville de Lars von Trier : malheureusement, tout cela est bien travaillé, exécuté avec maestria, mais cela reste terriblement décoratif et largement arbitraire - bravo pour la performance, mais où est le théâtre ?
Il n'est pas beaucoup plus dans le travail d'Olivier Py, qui se limite à une mise en place assez soigneuse, que quelques éléments en décalage (le jeu sur les enfants représentés en adolescents ennuyés, par exemple) n'arrachent pas au prosaïsme. J'aurais pu commenter son Trouvère sur des pages et des pages, ici je me trouve arrêté au bout de trois lignes...

Le problème, c'est que ça n'allait pas mieux musicalement : comble de malheur, les deux protagonistes, Sophie Koch et Yann Beuron ont été annoncés malades ce samedi ; Beuron pouvait encore à peu près faire illusion, mais Koch était dans un état vocal tel qu'il me semble irresponsable - à l'égard de l'artiste comme du public - de ne pas lui avoir cherché et trouvé une remplaçante - il reste loisible de s'interroger sur la surdistribution de cette artiste par Nicolas Joel, qui semble toujours chanter dans une langue étrangère même en français... Le reste de la distribution est tout juste honnête, à commencer par un grand prêtre d'Apollon (Jean-François Lapointe) complètement éteint.
La poisse majeure, pourtant, c'est le collectif plus encore que l'individuel : on a retrouvé un Minkowski aussi peu inspiré que pour son sinistre Lucio Silla de Salzbourg, incolore, souvent franchement mou, dirigeant sans conviction un orchestre lui-même mal en point (ces cuivres !), et le chœur a atteint des sommets de laideur qu'on n'est habitués à entendre que du chœur de Radio France. Je suis un grand admirateur de Minkowski et de ses musiciens ; en ne comptant que les soirées réussies, j'ai bien dû les entendre une trentaine de fois, voire plus* ; j'espère que cette méforme de l'année 2013 ne se prolongera pas, parce qu'on a encore bien besoin d'eux.

*Je suis à peu près sûr que la première fois que j'ai vu Minkowski - sans ses troupes ! -, c'était Idomeneo à l'Opéra Bastille en février 1996. Cette soirée n'entre pas dans le compte des soirées réussies, entre la production mortelle de feu Jean-Pierre Miquel et une distribution largement dépassée par l'inadéquation de l’œuvre et de la salle et par une mise en scène les laissant à l'abandon (Rolfe-Johnson, Upshaw !).

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