jeudi 22 août 2013

Wiener Philharmoniker - Festival de Salzbourg : les voyages forment la jeunesse

Quel festival ! Je ne parle pas du Festival de Salzbourg lui-même, concerts, opéras et pièces de théâtre, mais du festival de coups bas, de petites phrases et de grandes déclarations auxquels se livrent depuis plusieurs mois les responsables du festival, les politiques autrichiens et quelques artistes choisis autour du présent et de l'avenir du plus prestigieux festival du monde - ou en tout cas du plus cher. Ma déclaration préférée, c'est celle de l'Intendant (directeur artistique) Alexander Pereira qualifiant de "cris d'orfraie répugnants" les craintes de la présidente du festival qu'un déficit vienne pour la première fois depuis longtemps entacher les comptes du festival. Mais ce n'est pas encore là la grande affaire : voilà que l'Orchestre Philharmonique de Vienne s'en va. Ou presque.

En 2016, le contrat qui lie l'orchestre et le festival, et qui prévoit qu'ils sont le "centre artistique du festival", vient à son terme. Dans un festival lui-même en pleine crise d'identité (à cause de Pereira, mais pas seulement), c'est donc le bon moment pour faire sentir qu'on est indispensable et que le successeur dudit Pereira, nommé fin septembre pour prise de fonction en 2017, ferait bien de ne pas jouer au plus fin avec eux.
Aucun doute donc : les Viennois, qui disent qu'ils n'auraient pas de mal à trouver à s'employer ailleurs, resteront à Salzbourg. Mais rêvons un peu : et s'ils partaient ?
Eh bien, ce serait tant mieux. Pas seulement à cause de leur misogynie intacte (et impardonnable) et de leur gérontocratie. Foin du passé et des mythes fondateurs : les Wiener, comme marque commerciale, c'est fantastique ; comme orchestre, non. Chaque année, les orchestres se multiplient sur les bords de la Salzach : qu'il s'agisse - pour cette année - du Gustav-Mahler-Jugendorchester, du RSO Wien, des deux orchestres salzbouregois (Mozarteum et Camerata) ou de l'Orchestre de la Radio Bavaroise, tous m'ont offert des plaisirs orchestraux infiniment supérieurs à ceux des Viennois. Meistersinger indignes sous la direction de Daniele Gatti, chef naufrageur s'il en est (mais pourquoi l'acceptent-ils ? et comment, même sous un mauvais chef, en arrivent-ils à jouer si mal ?) ; Falstaff de pure routine sous la direction de Zubin Mehta, qu'ils aiment parce qu'il ne les embête pas (même fonctionnement que certains orchestres parisiens...) ; concert tout juste passable sous la direction du même, avec un concerto pour violon de Mozart défait et une Cinquième de Mahler comme vous pouvez en entendre à longueur d'année par n'importe quel orchestre de province un tant soit peu tenu. Et les échos qui parviennent de Così fan tutte parlent d'une débâcle musicale, largement imputable sans doute à Christoph Eschenbach, mais les critiques pointent aussi la médiocrité du jeu orchestral.
Mozart, justement : c'est la première fois depuis 2002, hors année Mozart (2006), que les Viennois inscrivent une œuvre de Mozart à leurs programmes de concerts symphoniques salzbourgeois. C'est très révélateur : à force de lutter de toutes leurs forces contre le mal musical absolu que sont les baroqueux, voilà que l'orchestre a oublié son propre Mozart, a oublié ce qu'il voulait faire, lui, de ces partitions. Bruckner, Mahler, oui, ça les botte ; Mozart, Haydn, bof. Eux qui se sont battus comme des lions pour conserver l'exclusivité des opéras de Mozart à Salzbourg l'ont finalement laissé filer comme un poids dont on est heureux de se débarrasser.

Bien sûr, Salzbourg, ce n'est pas que Mozart ; mais ce divorce inavoué pèse très lourd ici. Allez donc découvrir le vaste monde d'aujourd'hui, et revenez-nous quand vous aurez élargi votre horizon. Cela vous fera du bien comme à nous.

Ceci n'étant qu'un avant-goût : je vais vous reparler plus en détail de cette édition 2013 du festival de Salzbourg...

2 commentaires:

  1. Cher Rameau,

    C'est toujours avec plaisir que nous suivons les actualités de votre blog ainsi que vos critiques, d'autant plus que nous partageons bon nombre de vos points de vue.
    Néanmoins, nous ne pouvons nous empêcher de nous esclaffer à chaque fois que vous désignez les musiciens de l'orchestre philharmonique de Vienne par le terme "Wiener". En effet, dans les contrées teutonnes, le terme "Wiener" désigne d'infâmes saucisses à faible diamètre et de forme allongée que l'on peut avaler à toute heure dans la journée, après une folle soirée au KitKatClub ou au deutsche Oper par exemple. A moins que vous ne souhaitiez faire un trait d'esprit en signifiant que l'écoute des Viennois interprétant Beethoven sous la baguette de Christian Thielmann donne autant de plaisir que le goût desdites saucisses?
    Remarquez par ailleurs que les critiques germanophones ne désignent pas les musiciens de l'orchestre de Paris par "Pariser", pas plus que ceux de l'orchestre national de Lyon par "Lyoner".

    Dans l'impatience du détail de vos compte-rendus salzbourgeois
    Bien à vous

    Skipy

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  2. Remarque amusante... Il me semble quand même que la presse germanophone, pour ne pas répéter constamment Wiener/Berliner Philharmoniker, reprend assez régulièrement par le Wiener ou Berliner (lesquels sont aussi, je sais bien, des beignets). Je n'avais pas d'intention de jeu de mot, mais je ne crois pas que dans le cas présent j'aurais choisi cette métaphore-là: je supporterais mieux un jeu aseptisé mais propre que ce que j'ai entendu cette année à Salzbourg de la part des Viennois...

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