vendredi 28 novembre 2008

Un palmarès récent des meilleurs orchestres du monde, établi sur la base d'un (étroit) sondage auprès de quelques critiques musicaux, fait actuellement l'objet de toutes les attentions dans le petit monde de ceux que ça intéresse : tel orchestre est trop haut classé, tel autre trop bas, un troisième... Cela n'a guère d'importance, sans doute - mais ce qui fait le plus parler en France, c'est qu'aucun orchestre français ne fait partie de la liste. Aucun orchestre français, c'est-à-dire, dans la perspective française, aucun orchestre parisien (les autres peuvent être bons dans leur coin, tout le monde s'en moque).

À part un noble élan nationaliste (noble, façon de parler), je ne vois guère ce qui justifie une telle indignation. Faisons un petit panorama.
Nous avons d'abord les deux orchestres de Radio-France. Quand on ne fait que lire les critiques, on a souvent l'impression d'avoir à faire à de grands orchestres dirigés par d'immenses chefs. Il se trouve, cela dit, que les critiques français sont, étaient ou voudraient bien être producteurs à Radio-France, et par conséquent fort peu indépendants. Qu'à cela ne tienne, le public suit, en masse : oui, l'Orchestre National de France remplit plus ou moins le Théâtre des Champs-Elysées à chaque concert (donné une seule fois), quand l'Orchestre Philharmonique de Berlin ou les orchestres de Munich remplissent leur Philharmonie respective, plus grande que la salle parisienne, en général trois fois par programme, dans des villes beaucoup plus petites, avec des répertoires plus audacieux. Car quand le Philharmonique de Radio-France, pesamment dirigé par Myung-Whun Chung, joue la 9e de Beethoven, il serait rationnel de la jouer au moins deux fois pour satisfaire la demande : mais non, une telle manoeuvre commercial les déshonorerait sans doute.
Directeurs musicaux médiocres (entre un Chung littéral et plat et un Masur en fin de carrière, pompeux et vide, en attendant Daniele Gatti que je n'ai pas eu l'occasion d'entendre, tous deux clairement dans la 2e division de la compétition des chefs, à l'unisson donc de leurs orchestres), répertoire étroit, sonorités plombées et complaisance du milieu musical qui ne favorise pas la recherche de la qualité: le bilan est lourd, et il n'est pas meilleur pour les autres formations parisiennes, que ce soit les deux orchestres cofinancés par la Ville de Paris et l'Etat (on attend, pour une éventuelle renaissance de l'Orchestre de Paris, le départ de son directeur musical ; quant à l'Ensemble Orchestral de Paris, c'est une cause perdue) ou les orchestres dits associatifs, toujours au bord du naufrage mais toujours sauvés in extremis, on ne sait pourquoi. Seul l'Orchestre de l'Opéra s'en sort mieux : à la condition absolue, bien connue depuis longtemps, qu'il y ait une bonne entente avec le chef, voilà un orchestre qui peut être merveilleux : c'est hélas rare.

Le pire dans ce triste bilan, c'est que la platitude de cette vie orchestrale parisienne, qui devrait conduire le public parisien à se jeter sur les nombreux concerts des grands orchestres mondiaux invités à Paris, a tellement privé ce public de sa culture orchestrale que ces concerts se jouent souvent devant des salles partiellement remplies...

À part ça, bien sûr, il y a la province : je préfère fortement entendre Jacques Mercier et la Philharmonie de Lorraine plutôt que Masur ou Chung (ou, pire que tout, Riccardo Muti) avec les orchestres parisiens...

RECTIFICATIF La France, et plus précisément Paris, en possède tout de même un, de ces prestigieux orchestres internationaux. Il s'agit, évidemment, de l'Ensemble Intercontemporain.
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