vendredi 12 mars 2010

2010/2011 : Le TCE est en ligne

Comme chaque année, l'adresse du site en développement du Théâtre des Champs-Elysées a filtré, et voilà ma sélection de quelques soirées qu'il serait intéressant de passer Avenue Montaigne...

Opéra
On le sait, ce n'est pas au TCE (ni maintenant nulle part à Paris, c'est vrai) qu'on va trouver des productions innovantes, stimulantes, étonnantes. Ce n'est pas une raison pour bouder un Idoménée en fin de saison : confié à Jérémie Rhorer (dont j'ai déjà pu vérifier les affinités avec cette musique) et Stéphane Braunschweig, il devrait ne pas avoir de mal à être un des spectacles les plus intéressants de la saison parisienne. [JUIN]
On saluerait aussi volontiers le fait qu'un opéra de Vivaldi, Orlando Furioso, ait pour une fois droit à un traitement scénique, si celui-ci n'était confié au terrible Pierre Audi qui avait monté pour Tamerlano de Haendel ou Zoroastre de Rameau d'ennuyeuses versions de concert en costumes XVIIIe. [MARS]
Toujours pour le baroque, c'est David McVicar qui montera un opéra fragile et passionnant de Haendel, Orlando, sorte d'adieu mélancolique au monde de Roland et d'Angélique : son Agrippina était passionnante, d'autres de ses productions sont au choix d'un ennui pesant (la Semele reprise en ces lieux en fin de saison) ou d'une vulgarité confondante (Le couronnement de Poppée il y a quelques saisons, toujours au TCE). Avec Emmanuelle Haïm à la direction, on est à vrai dire protégés de tout risque d'émotion forte.
La saison est complétée par deux productions post-1800 : Jean-Claude Malgoire et Christian Schiaretti importent de Tourcoing une Scala di seta de Rossini, et Sasha Waltz, remarquable chorégraphe, s'attaque à un opéra de Pascal Dusapin, fort médiocre compositeur hélas fort bien en cour.

Côté versions de concert, il y a pléthore : outre l'habituelle cohorte des opéras baroques (à noter une intéressante Alcina par Marc Minkowski et Le Carnaval de Venise de Campra), on aura intérêt à musarder du côté de Rossini (Otello dirigé comme c'est inévitable par Evelino Pidò), de Mozart (La finta giardiniera mérite vraiment qu'on s'y arrête) ou de Wagner (un Parsifal dirigé par Kent Nagano, avec une belle distribution autour de Nikolai Shukoff et Angela Denoke). Je pourrais aussi signaler Lodoïska de Cherubini, qu'avait massacré Riccardo Muti il y a de nombreuses années, et qui a une chance de se refaire sous les doigts de Jérémie Rhorer.
Par contre, on ne voit vraiment pas l'intérêt de deux versions de concert verdiennes (I due Foscari et Il trovatore), sans parler d'un Fidelio confié à Kurt Masur avec une distribution sans charme : on sait Masur depuis longtemps incapable de diriger correctement quelque partition que ce soit ; il serait temps que Radio France parvienne enfin à se débarrasser de ce boulet.

Orchestres
Les invités habituels sont là : on laissera le Philharmonique de Vienne nager dans sa graisse pour une intégrale des symphonies de Beethoven sous le pesant Christian Thielemann ; si on veut du Beethoven, il y aura toujours le Mahler Chamber Orchestra avec le jeune chef Tugan Sokhiev (13/2), ou les concerts du London Philharmonic avec Vladimir Jurowski. Ce dernier dirige aussi l'un des deux concerts de l'Orchestra of the Age of Enlightenment, l'autre (Haydn/Mozart, 18/6) étant confié à Simon Rattle.
Moins jeune, Seiji Ozawa vient à deux reprises, pour un concert symphonique et des Noces de Figaro en version de concert.
La Radio Bavaroise ne manque pas son étape parisienne : toujours sous la direction de Mariss Jansons, elle vient avec un programme qui joint la 9e symphonie de Chostakovitch à la trop courante 4e de Mahler (18/12).
Parmi les orchestres plus rares, il faut signaler une mini-résidence (3 dates) de l'Orchestre Philharmonique de Rotterdam sous la direction de deux chefs prometteurs, Juka Pekka Saraste et Yannick Nézet-Séguin. Quant à la Staatskapelle de Dresde, elle vient pour deux concerts, mais se cherche un chef après la démission surprise, avec pertes et fracas, de son (médiocre) directeur musical Fabio Luisi.
Et ainsi de suite...

Piano, musique de chambre
L'événement, c'est évidemment l'intégrale des quatuors de Beethoven par le Quatuor Artemis, dans le cadre des (trop chers) Concerts du dimanche matin revenus au TCE : les Artemis sont un ensemble extraordinaire, on aurait tort de s'en priver...
Pour le reste, on retrouve les habitués du Théâtre, ces Sokolov, Lugansky, Aimard, Pires dont on ne saurait se lasser, et on remarque avec plaisir la présence du Quatuor Hagen. En revanche, il y a dommageable abondance de Capuçons et de Fazil Say, qui ne témoigne pas vraiment d'une haute exigence musicale de la part de la nouvelle équipe de direction, qui semble vouloir dans ce domaine clairement privilégier la jeunesse, avec pas mal de nouvelles têtes dans le casting.

Chant
Il n'y a pas de type de concert moins intéressant que le récital de chanteur. Ces grandes robes et smoking tout sourire dehors, "tellement spontané(e), tellement simple" (traduisez : tellement bien formaté(e) par le marketing), ça n'a rien à voir avec la musique. Les simagrées de la Bartoli ayant été transférées à l'autre bout du VIIIe arrondissement - autant dire à l'autre bout du monde -, il reste Rolando Villazon pour remporter le prix du concert le plus bête, avec un programme de chansons mexicaines donné deux fois (!), mais les deux récitals (seul et avec Andreas Scholl) de Philippe Jaroussky sont de sérieux outsiders.
Mais tous les chanteurs, heureusement, ne tombent pas dans ce travers : Jonas Kaufmann fait l'exact inverse, avec un pur Liederabend consacré à la Belle meunière de Schubert (14/10), Thomas Hampson idem avec Le voyage d'hiver (16/1). Stéphane Degout se livre aussi aux délices de la mélodie avec des compositeurs à vrai dire moins soigneusement sélectionnés (28/1). Côté baroque, on notera avec intérêt le concert de Ian Bostridge consacré à de la musique rare du XVIIIe siècle ; Magdalena Kozena et Anne-Sofie von Otter livrent quant à elles un duel à distance (7/2, 27/4) autour de Monteverdi et de son temps (complété jusqu'à Haendel pour la seconde).

Danse
La danse avenue Montaigne, c'est toujours du sûr, du solide : risque artistique nul, il faut pouvoir plaire aux mécènes. On retrouve donc les habituels Gala des étoiles du XXIe siècle, Grupo Corpo, Saint-Pétersbourg Ballet Théâtre (comme on dit en bon français) et Saisons russes (cette série commencée l'an passé - la représentation que j'en ai vu cette année me laisse penser que si ce n'est pas inintéressant, ce n'est pas non plus indispensable). Sylvie Guillem revient avec son complice en médiocrité virtuose Russell Maliphant : significativement, on la place au moment des fêtes, parce que ça se vend bien, il y a une star, ça ne pose pas de problème de digestion. Enfin, seule originalité de la saison, la troupe russe de Boris Eifman, chorégraphe un peu oublié aujourd'hui, vient présenter son Anna Karénine [DÉCEMBRE] : pourquoi pas, après tout ?

Pour plus de détails : Site (en cours de développement) du Théâtre des Champs-Elysées
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