mardi 26 février 2013

Opéra de Paris 2013/2014 - Ballet

Fin de règne pour Brigitte Lefèvre... Enfin, enfin, enfin ! Disons-le pourtant : il y aura des kilogrammes de distributions idiotes, les reprises ne seront pas toujours montées avec le soin qu'elles mérites et vous aurez Ludmila Pagliero tous les soirs, MAIS il y a deux ou trois choses intéressantes, tout de même, et je ne perdrai pas le chemin de Bastille ou de Garnier la saison prochaine (attendez que je parle d'opéra...).
http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/c/c4/Sleeping_Beauty_-Anna_Johannson.jpg
La Belle au bois dormant, version 1892. Espérons que les danseurs de l'Opéra montreront un peu plus leur joie de vivre...


Maismaismais... c'est qu'on me lit, dans les étages nobles de Garnier. Deux des ballets que j'avais placés sur ma liste des ballets oubliés à ressusciter d'urgence sont sur la liste...
Je commence par le plus évident : La Belle au bois dormant, bien sûr, devait ressortir un jour ou l'autre, ne serait-ce que parce qu'on n'a pas encore trouvé à l'Opéra meilleure solution pour faire rentrer des sous que d'exploiter sans relâche les ballets montés par Noureev (on me murmure qu'en 2047 encore...). C'est donc chose faite, et je m'en réjouis. Du point de vue des distributions, pas d'inquiétude : vous aurez Ludmila Pagliero tous les soirs, mais la dernière fois c'était Mélanie Hurel, match nul (oui, oui, très très nul, certes). Simple conseil : évitez de (re)voir le DVD du Royal Ballet avec Alina Cojocaru juste avant d'aller à Bastille...

L'autre, très franchement, je n'y croyais plus. Doux mensonges, je trouve, est d'autant plus bienvenu qu'on sort d'une série de ce pensum sans contenu qu'est Kaguyahime, tout juste bon à contenter le goût pour l'exotisme de convention des lectrices de Figaro Madame. Enfin on va (re)voir ce qui fait vraiment le génie de Kylian, même si la pièce est austère et va donc échapper à un certain nombre de balletomanes. Elle est couplée à la reprise de Glacial Decoy de Trisha Brown, ce qui est plutôt intéressant (mais n'apportera pas au balletomane moyen sa dose de glamour), et à une création de Saburo Teshigawara, dont la précédente, qui date de 2003 m'avait beaucoup ennuyé.

En ce qui concerne les grands ballets du répertoire, il va falloir s'arrêter là et aller voir ailleurs. Néo-classique, on vous dit. Narratif - La dame aux camélias de Neumeier, Onéguine de Cranko - ou pas - Le Parc de Preljocaj -, peu importe. J'avoue à titre personnel arriver à un certain niveau de saturation à l'égard de ces trois ballets, d'autant plus qu'ils sont un peu donnés partout en Europe ces derniers temps (j'ai vu le Cranko à Berlin, Paris, Munich et Londres...) ; ils n'auront pas de mal à trouver une fois de plus leur public, mais je crois que je vais me limiter à des doses réduites pour ne pas m'en dégoûter, ce serait tout de même dommage.

J'avoue qu'il en va un peu de même pour l'Orphée et Eurydice de Pina Bausch, que la troupe emmène d'ailleurs en tournée chez Gerard Mortier à Madrid (retour à l'envoyeur...). C'est très beau, sans aucun doute, et puis Alice Renavand, mais cette beauté est un peu glacée pour moi. Une fois, sans doute, mais pas plus... On ne peut pas s'empêcher de considérer que le principal intérêt de cette pièce pour la direction de l'Opéra, c'est qu'en montant un ballet au tarif opéra, on remplit généreusement les caisses, peu importe le flacon...

Pour Notre-Dame de Paris de Roland Petit, mon problème n'est pas de même nature ; ce n'est pas une pièce que j'ai vue et revue, plutôt une vieillerie que je ne connais pas très bien, mais que je ne suis pas très sûr de souhaiter vraiment connaître de plus près. Rien que la musique de Maurice Jarre a de quoi faire fuir le mélomane au cœur le mieux accroché.

Mais une partie importante de la saison est constitué de soirées mixtes, double ou triple bill comme on dit au pays béni du Royal Ballet, ce que je trouve personnellement très agréable et intéressant, même si j'ai des réserves sur les compositions de ces soirées (je ne reviens pas sur celle autour de Doux mensonges).
Le pire, sans nul doute, c'est l'invitation de Benjamin Millepied, ce chorégraphe nul qui se trouve être le futur directeur du Ballet de l'Opéra. Quand en plus on nous annonce Daphnis et Chloé de Ravel, le sommet de ce que je n'aime pas dans la musique française (ah, cette délicatesse de ton, ces nuances infinies, cette orchestration raffinée... du jus de chaussette, en d'autres termes), qui plus est dirigé par Philippe Jordan, franchement, vous m'avez compris. En plus, ce sera interminable : je pense qu'on tient là le digne successeur du nanar absolu du ballet de l'Opéra de ces dernières années, j'ai nommé la Psyché d'Alexei Ratmansky. Comme la pièce qui l'accompagne est Palais de Cristal alias Symphony in C de Balanchine, dont j'ai un souvenir vague mais plutôt ennuyé, je crois que je risque de ne pas aller au-delà de l'acquit de conscience pour cette soirée.

Je passe par acquit de conscience (bis) sur une soirée dépourvue d'intérêt, mais alors vraiment totalement. Car oui : vous aurez la version 2 (Ravel/Millepied), mais vous aurez aussi la version 1 (Franck/Ratmansky). Ratmansky, ex-directeur du Bolchoi, est un chorégraphe plus établi que Millepied, mais il est tout aussi nul. Sa pièce avait suscité beaucoup de sarcasmes en raisons de costumes et de décors au-delà du ridicule (il faut parfois parler franchement d'idiotie, chez ceux qui sont capables de vous proposer des pièces qui insultent à ce point l'intelligence du spectateur). Le spectacle est complété par l'interminable et fade Dances at a Gathering : je crois que je n'ai vraiment pas grand-chose à dire à ceux qui aiment ça.

Fröken Julie, en suédois dans le texte

La plus intéressante est donc la soirée consacrée à deux chorégraphes femmes qu'on n'a guère l'habitude de voir sur nos scènes (il y a toujours une grosse majorité de chorégraphes hommes, y compris d'ailleurs chez les chorégraphes maison des petites soirées "Danseurs-chorégraphes", comme si les filles avaient peur/étaient dissuadées de se lancer...). Agnes de Mille, vraiment, c'est un trou noir pour moi ; je sais bien que sa pièce a déjà été donnée à l'Opéra en 1996 ; pour le reste... Birgit Cullberg, c'est autre chose : je n'ai jamais rien vu d'elle (ni vraiment le souvenir qu'une de ses pièces ait été donnée récemment en France), mais d'une part c'est la mère de Mats Ek, d'autre part le ballet est adapté de Mademoiselle Julie de Strindberg, pièce magnifique qui a donné lieu à un des plus beaux opéras contemporains sous la plume de Philippe Boesmans. Comme j'aime énormément les métamorphoses d'une même œuvre sous toutes ses formes, me voilà tout impatient.

Pour le côté people, on note la retraite de trois étoiles, l'une assez récente, Isabelle Ciaravola, les deux autres piliers de la maison depuis longtemps, Nicolas Le Riche et Agnès Letestu, tous trois à vrai dire plus vraiment en pleine maturité artistique. Bon vent à eux...


(et aussi le Bolchoi qui vient, comme si ça ne suffisait pas, nous ennuyer avec un Ratmansky de plus... Quand on n'a plus d'intégrité artistique...)

7 commentaires:

  1. Bonjour,
    bon, j'avoue, je ne suis pas hyper enthousiaste. et quand e plus, j'ai découvert les tarifs, je me suis demandé si j'allais reprendre un abonnement.
    Mais tout de même, vous êtes ultra négatifs. Pour mieux comprendre, et vous découvrir un peu, quelle serait votre saison idéale à l'Opera ? A moins que votre saison idéale soit au TCE, au Théâtre de la Ville ou à Chaillot?
    Bonne soirée

    RépondreSupprimer
  2. La saison idéale, ça n'existe pas, et je ne demande pas mieux que de me laisser surprendre ; c'est à la direction de me proposer des découvertes et de créer l'enthousiasme. Je ne suis pas "négatif", je suis critique, ce n'est pas la même chose, et je ne crois pas être le seul à avoir de grosses critiques à formuler contre Brigitte Lefèvre, cet animal politique qui a construit son pouvoir en étouffant toute la vie interne de la troupe. Pour le coup, je suis hostile à deux choses en particulier:
    -la gestion purement comptable des pièces sans souci d'équilibre et de variété (on a les droits sur tel ou tel ballet, donc on le prend et reprend jusqu'à plus soif, quitte à lasser les amateurs (je ne dis pas du tout que Le Parc, Onéguine ou la Dame sont de mauvais ballets !); pendant ce temps des pans entiers de répertoire dorment, y compris du répertoire contemporain (n'aurait-on pas pu ressortir la sublime Giselle de Mats Ek plutôt que de redonner Onéguine, par exemple?);
    -la direction choisie pour la danse contemporaine, qui me semble épouvantablement fade et conformiste, avec ce zéro absolu de Ratmansky (même si je comprends bien que quand on crée une pièce on a tendance à la rentabiliser, même quand elle est aussi ridicule que Psyché), et maintenant Millepied...

    RépondreSupprimer
  3. J'attends avec impatience votre point du vue solipsiste sur la saison d'opéra 2013-2014. Le poids de votre front vous entraîne en avant... idéal pour le grand saut dans la bile et le fiel nombriliste !

    RépondreSupprimer
  4. J’espère que tout va bien!?

    RépondreSupprimer
  5. Ohlàlà, oui, j'ai juste été très débordé (je veux dire plus que d'habitude !). Je vais poster cet AM mon petit mot sur les opéras, et bientôt je reparle de Munich (cf. mes critiques sur Resmusica: Jenufa et Boris/Bieito)...

    RépondreSupprimer
  6. Bonjour,
    Je viens de découvrir votre blog, et je dois dire que j'aime beaucoup votre ton ! Vous venez de gagner une lectrice.
    À bientôt

    RépondreSupprimer
  7. Merci beaucoup - un encouragement pour être présent de manière un peu moins épisodique !

    RépondreSupprimer

Une petite râlerie ? Une pensée en l'air ? Une déclaration solennelle à faire ? C'est ici !

NB : Les commentaires sont désormais modérés en raison de problèmes de spam. Je m'engage à publier tous les messages qui ne relèvent pas du spam, même à contenu désagréable

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...