Une des particularités de ce début de saison pour moi aura été la multiplication des spectacles lyriques "légers", du Chanteur de Mexico (voir ci-dessous!) à Candide en passant par la Veuve joyeuse. Je ne peux pas dire que cela corresponde vraiment à un goût personnel, mais plutôt à une tendance générale que ma fréquentation boulimique des salles ne fait qu'enregistrer. Quant à ce que cela dit sur notre époque, j'en parlerai peut-être plus tard - peut-être jamais, peut-être demain, mais pas aujourd'hui, c'est certain! Peut-être avons-nous quelque chose à cacher, comme les nazis le faisaient à travers les nombreuses comédies légères et opérettes filmées qui constituaient l'essentiel de la production allemande de la première moitié des années 1940...
Ce que je voudrais surtout dire, en fait, c'est que je ne me suis pas amusé beaucoup, dans tout cela! Je ne reparlerai pas du Chanteur de Mexico, spectacle ennuyeux et poussif frisant constamment l'amateurisme; dans un cas, c'était volontaire, et plutôt réussi: je veux parler de "L'histoire vraie de la Périchole" de Julie Brochen d'après Offenbach, un spectacle d'Aix 2006 vu récemment à Lyon, avec la superbe Jeanne Balibar qui par ailleurs chante fort mal. On pourra certainement déceler une forme de snobisme postmoderne dans cette adaptation, mais j'ai été sensible à l'étonnante mélancolie qui s'en dégageait, à la théâtralité innovante de la narration, à la fragilité assumée de ce spectacle. Je n'ai donc pas beaucoup ri, parfois souri, mais j'ai néanmoins pris beaucoup de plaisir à cette évocation impressionniste.
Il n'y avait certes pas tellement de musique dans cette adaptation, mais y en a-t-il beaucoup plus dans La Veuve joyeuse, que ce soit dans la version originale (vue à Augsbourg en novembre) ou dans une pitoyable traduction française à Lyon il y a quelques jours? On se demande pourquoi, un siècle après, on se croit encore obligé de jouer cette pauvre chose, alors que mille autres oeuvres, plus drôles, plus entraînantes, plus intelligentes (contrairement à ce que pensent certains, ça ne nuit pas) attendent leur tour! Les méfaits de la notoriété, une fois de plus: quand une oeuvre est connue du grand public, on a bien du mal à s'en débarrasser - j'ai d'autres exemples en tête!
Cela dit, il faut reconnaître que la version augsbourgeoise était regardable, grâce à l'expérience de l'ensemble des participants et grâce au charisme de l'interprète principale, la soprano Sally Du Randt, qui est employée à l'année au théâtre d'Augsbourg. A côté d'elle, la malheureuse Véronique Gens apparaît pour ce qu'elle est, une chanteuse sympathique et dotée d'une voix que nous ne contesterons pas, mais toujours aussi lymphatique et dénuée de tout rayonnement. Elle aurait pu être sauvée par la mise en scène: elle ne l'a pas été, à cause d'un travail d'une étonnante pâleur de la part de Macha Makaieff. C'était, je l'avoue, pour elle que j'y allais, espérant qu'elle mettrait un peu de folie, de singularité, d'individualité et, osons le dire, d'émotion dans cette piécette.
Las! Madame a eu l'idée de rendre sérieux et émouvants les deux marionnettes principales; on peut quand même dire qu'il eût été plus simple de prendre une oeuvre où les personnages principaux ont d'eux-mêmes de l'intérêt; surtout, cette entreprise est totalement ratée, la faute en partie à la mollesse incorrigible de Mme Gens: il en reste un spectacle propre sur soi, dans de bons gros décors "Au théâtre ce soir", avec une absence à peu près totale d'humour (sans même parler d'autodérision). On s'ennuie ferme pendant tout le spectacle, entouré qui plus est d'un public qui ne sait pas qu'on se tait à l'opéra et dans la salle d'opéra la plus mal conçue du monde.
Après tous ces malheurs censés nous mettre dans une ambiance festive, c'est avec une forte inquiétude que je me suis rendu hier soir au Châtelet pour Candide de Bernstein. Là encore, c'était le nom du metteur en scène qui m'y attirait, plus qu'une oeuvre dont les mérites musicaux restent bien modestes (à moins de comparer avec la Veuve joyeuse, bien sûr). Ouf! Robert Carsen reste Robert Carsen, et la réussite égale, au moins à proportion des mérites des oeuvres, celle de ses mémorables Alcina (Garnier 1999 et 2004, en attendant 2008?) et Rusalka (DVD TDK indispensable pour qui veut comprendre ce qu'est la mise en scène d'opéra). Je ne détaillerai pas, d'autant plus que chacun pourra s'en rendre compte dès le 20 janvier sur Arte: clarté du dessein général, perfection de la finition, profondeur du travail dramaturgique, sens du rythme et de la variété... Ecco un artista!, comme dirait un autre personnage d'opérette...
Reste à savoir pourquoi on choisit de jouer ce répertoire, a fortiori dans des théâtres subventionnés qui n'ont pas à aller ainsi pêcher le client en jouant la facilité. Mais c'est, une fois encore, une autre histoire!
mercredi 27 décembre 2006
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